Que les Américains ont-ils réellement accompli avec leurs frappes nocturnes sur trois sites nucléaires en Iran ? L’illusion de la puissance, la réalité de l’échec stratégique
Dans la nuit, des avions américains ont lancé des frappes ciblées sur trois sites liés au programme nucléaire iranien. L’opération, saluée à Washington comme un « signal fort » envoyé à Téhéran, se voulait une démonstration de force. Mais derrière le spectacle des explosions et la rhétorique martiale, une question centrale demeure : qu’ont réellement accompli les États-Unis ?
1. Les infrastructures clés sont toujours debout
Malgré l’usage de munitions guidées de haute précision et des moyens technologiques sophistiqués, les infrastructures nucléaires critiques de l’Iran semblent largement intactes. Selon les premières analyses, seuls des dégâts mineurs auraient été infligés à des installations secondaires. Les capacités de production nucléaire iraniennes — notamment les centrifugeuses et les sites d’enrichissement — restent opérationnelles.
2. L’enrichissement se poursuit — et l’objectif militaire aussi
Les faux-semblants diplomatiques ont disparu : l’Iran ne cache plus son intention d’accéder à l’arme nucléaire. Loin d’être freinées, les activités d’enrichissement de l’uranium sont désormais perçues comme une nécessité vitale. L’agression militaire américaine a renforcé la légitimité intérieure et stratégique du programme nucléaire.
3. Des puissances prêtes à livrer l’arme nucléaire à Téhéran
Dans les coulisses, des signaux émergent : certains pays seraient disposés à fournir à l’Iran des ogives nucléaires ou leur technologie. En l’absence de garanties sécuritaires et face à une hostilité croissante de l’Occident, Téhéran pourrait ne plus être seul dans la course à la dissuasion.
4. Israël vacille sous les coups
Au même moment, Israël fait face à une vague d’attaques sans précédent. Les explosions secouent Tel-Aviv, les systèmes de défense sont saturés, et une partie de la population vit dans la panique. Le front intérieur est affaibli, et les forces soutenues par l’Iran, du Liban à l’Irak, ont élargi le champ de bataille. Le prétendu effet dissuasif américain s’est transformé en catalyseur du chaos.
5. Les États-Unis plongent dans une nouvelle guerre
Washington est désormais englué dans un nouveau conflit au Moyen-Orient, aux contours incertains. Une opération terrestre, jadis inenvisageable, est aujourd’hui sur la table. Les États-Unis s’embarquent dans une confrontation aux implications régionales massives, sans stratégie de sortie claire.
6. Le régime iranien sort renforcé
Ironiquement, le régime de la République islamique sort politiquement consolidé. Loin de s’effondrer sous les pressions extérieures, il profite de l’agression pour rallier les populations, justifier la répression intérieure et renforcer sa légitimité. L’ennemi extérieur, une fois de plus, devient l’outil du pouvoir.
7. L’unité nationale se resserre
Ceux qui étaient apolitiques, critiques ou indifférents au pouvoir se retrouvent, par instinct patriotique ou par rejet de l’ingérence étrangère, rassemblés autour du Guide suprême. Les frappes américaines ont transformé le ressentiment en solidarité.
8. Trump, l’ancien « président de la paix », embrase le Moyen-Orient
Donald Trump, qui aimait se présenter comme un président pacifiste, vient de plonger son pays dans un nouveau bourbier militaire. Ce qui devait être une démonstration de force éclair s’est mué en escalade incontrôlable. Son image d’homme pragmatique s’effrite au profit de celle d’un dirigeant téméraire.
9. Une opposition internationale massive
À l’échelle mondiale, la majorité des États condamne les actions américaines et israéliennes. L’opinion publique dans le Sud global est outrée. Même au sein de l’Union européenne, les alliés traditionnels expriment malaise et désaccord. Les rôles se sont inversés : ce sont désormais les États-Unis et Israël qui apparaissent comme les fauteurs de guerre.
10. Adieu, prix Nobel de la paix
L’idée — jadis lancée avec ironie — de voir Trump recevoir le Nobel de la paix n’a plus aucune crédibilité. Même dans un monde où certaines institutions semblent politisées, la guerre déclenchée par Washington rend toute récompense diplomatique grotesque. Quel début de mandat, Monsieur le Président. Félicitations…
Conclusion : Une frappe pour rien ?
Sur le plan stratégique, les frappes américaines contre les sites nucléaires iraniens sont un échec. Elles n’ont ni freiné le programme nucléaire, ni isolé l’Iran, ni renforcé la sécurité d’Israël. Elles ont, au contraire, provoqué une spirale de violence, renforcé Téhéran, et affaibli la position morale et diplomatique des États-Unis.
Une démonstration de force qui révèle, au fond, la faiblesse d’une puissance en perte d’influence.
Par Belgacem Merbah
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