Accéder au contenu principal

Sahara Occidental : John Bolton exhorte les États-Unis à soutenir le droit à l’autodétermination des Sahraouis

Dans une tribune parue le 28 mai 2025 dans The Washington Times, l’ancien ambassadeur américain auprès des Nations unies, John Bolton, sonne l’alarme sur un dossier diplomatique longtemps négligé par les États-Unis : celui du Sahara Occidental. Face à la montée des influences chinoise et russe en Afrique, Bolton appelle Washington à revenir à une position de principe en faveur de l’organisation d’un référendum d’autodétermination pour le peuple sahraoui.


Un conflit gelé depuis les années 1970

Le Sahara Occidental, vaste territoire côtier d’Afrique du Nord situé au sud du Maroc, reste l’un des derniers cas de décolonisation non résolus dans le monde. Lorsque l’Espagne, ancienne puissance coloniale, s’est retirée du territoire en 1975 à la suite de la mort de Franco, la région est entrée dans une ère d’instabilité. Le Maroc et la Mauritanie y ont déployé leurs troupes, provoquant une résistance armée du Front Polisario, mouvement sahraoui indépendantiste. Si la Mauritanie a rapidement renoncé à ses revendications, le Maroc a continué son occupation et contrôle aujourd’hui environ 80 % du territoire, le reste étant sous le contrôle du Polisario, soutenu par l’Algérie et basé près de Tindouf.

Le référendum saboté

L’espoir d’une solution pacifique avait émergé en 1991, lorsque la résolution 690 du Conseil de sécurité de l’ONU — soutenue par les États-Unis à l’époque — avait créé la MINURSO, une mission onusienne chargée d’organiser un référendum d’autodétermination. Ce processus, né d’un accord entre le Maroc et le Polisario en 1988, visait à permettre aux Sahraouis de choisir entre l’indépendance et une autonomie sous souveraineté marocaine.

Mais très vite, le Maroc a multiplié les manœuvres d’obstruction. Malgré des tentatives de médiation, notamment les Accords de Houston de 1997 sous l’égide du secrétaire d’État James Baker, Rabat s’est progressivement retiré de ses engagements, bloquant toute tentative sérieuse de tenue du référendum. Depuis, des centaines de milliers de Sahraouis vivent toujours dans les camps de réfugiés de Tindouf sous administration de l’ONU.

Enjeux géopolitiques et manipulations idéologiques

Selon Bolton, le Sahara Occidental est devenu un terrain d’affrontement indirect entre le Maroc et l’Algérie, hérité de la période postcoloniale. Rabat nourrit des ambitions territoriales sur des zones frontalières de la Mauritanie et de l’Algérie, exacerbant les tensions régionales.

Face à l’impasse diplomatique, les partisans du statu quo cherchent désormais à décrédibiliser le Front Polisario en l’associant à l’Iran et au terrorisme. Bolton dénonce fermement ces accusations qu’il qualifie de « propagande », notant qu’aucune preuve crédible ne vient étayer les allégations de collusion entre le Polisario et des milices pro-iraniennes.

Au contraire, insiste-t-il, les Sahraouis des camps de réfugiés ont toujours montré un attachement aux valeurs modérées, ouvertes et tolérantes. Des ONG américaines et des missions religieuses actives dans les camps attestent de cette réalité. Le sénateur James Inhofe, fervent défenseur du droit des Sahraouis, saluait déjà cette ouverture religieuse comme une preuve du caractère pacifique du mouvement.

Une opportunité pour les États-Unis

Pour Bolton, il est impératif que les États-Unis reviennent à leur politique originelle de 1991. Dans un contexte où la Chine et la Russie étendent leur influence en Afrique — parfois en profitant de l’absence de leadership occidental — ignorer une question aussi cruciale que celle du Sahara Occidental serait une erreur stratégique.

Il appelle les membres du Congrès à se rendre dans les camps de réfugiés pour constater la réalité du terrain, dialoguer avec les dirigeants du Polisario et les citoyens sahraouis, et ainsi réaffirmer l’engagement américain pour les principes du droit international et de l’autodétermination.

Conclusion

La tribune de John Bolton marque une prise de position importante de la part d’un acteur influent de la diplomatie américaine. En mettant en lumière les risques d’un désengagement prolongé des États-Unis et les conséquences humanitaires et géopolitiques d’un conflit oublié, Bolton rappelle que la paix durable au Maghreb et dans le Sahel passe par le respect du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.


Par Belgacem Merbah



Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

La CIA déclassifie un document qui permet de comprendre les véritables motivations du Maroc dans la guerre des sables de 1963

Le 23 août 1957, un document confidentiel de la CIA a été rédigé, dévoilant des éléments cruciaux sur la politique française vis-à-vis de l’Algérie, alors en pleine guerre d’indépendance. Récemment déclassifié, ce document éclaire d’un jour nouveau les intentions de la France concernant les zones pétrolifères sahariennes et ses stratégies post-indépendance. À travers des manœuvres diplomatiques, économiques et géopolitiques, Paris cherchait à préserver son contrôle sur cette région stratégique. Un Sahara Algérien Indispensable à la France Selon ce document, la France considérait le Sahara algérien comme un territoire d’une importance capitale, non seulement pour ses ressources pétrolières et gazières, mais aussi pour son positionnement stratégique en Afrique du Nord. Dans cette optique, Paris envisageait de maintenir coûte que coûte sa mainmise sur la région, en la dissociant administrativement du reste de l’Algérie. Cette politique s’est concrétisée en 1957 par la création de deux dép...

Supériorité des F-16 marocains sur les Su-30 algériens : Un déséquilibre stratégique inquiétant ?

Le rapport de force militaire entre le Maroc et l’Algérie constitue un enjeu stratégique majeur en Afrique du Nord. Depuis des décennies, les deux nations s’engagent dans une course à l’armement, mettant un accent particulier sur la modernisation de leurs forces aériennes. Cependant, une nouvelle dynamique semble se dessiner avec la montée en puissance de l’aviation marocaine, renforcée par l’acquisition des F-16V Block 70 , livrés en 2023, et des missiles AIM-120C/D . Pendant ce temps, l’Algérie peine à moderniser sa flotte de Su-30MKA, toujours limitée par l’absence de missiles longue portée de dernière génération , ce qui pourrait progressivement redéfinir l’équilibre aérien dans la région. Cette asymétrie soulève plusieurs préoccupations : Le Maroc pourrait exploiter cet avantage pour adopter une posture plus agressive , comme ce fut le cas par le passé. L'Algérie se retrouve exposée à une éventuelle suprématie aérienne marocaine , en particulier dans un scénario de conflit. Le...

Le Mythe du Soutien Marocain à la Révolution Algérienne : Une Histoire de Calculs et d’Opportunisme

L’histoire des relations entre le Maroc et la Révolution algérienne est souvent déformée par une propagande soigneusement entretenue par le régime marocain. Cette version des faits présente Mohamed V comme un allié indéfectible du peuple algérien dans sa lutte pour l’indépendance. Pourtant, une analyse minutieuse des événements démontre que ce soutien n’était ni désintéressé, ni motivé par une réelle solidarité. Il s’agissait avant tout d’un levier diplomatique visant à consolider le pouvoir du souverain marocain et à servir les ambitions territoriales du royaume chérifien. Un Soutien Dicté par des Intérêts Stratégiques Lorsque la Guerre d’Algérie éclate en 1954, le Maroc, fraîchement indépendant depuis 1956, se trouve dans une position délicate. Mohamed V cherche à asseoir son autorité dans un pays encore fragile, marqué par des tensions internes et des incertitudes quant à son avenir politique. Dans ce contexte, le soutien à la lutte algérienne contre la France devient un outil de né...