Décidément, le Makhzen ne se refait pas. Chaque fois qu’un ministre étranger daigne prononcer un mot vaguement diplomatique, les tambours de la propagande s’emballent à Rabat. Et voilà que Hespress nous sert, avec son ton triomphal habituel, une nouvelle fable : la Russie aurait « évolué » vers le « soutien du plan d’autonomie ». Rien que ça.
Sauf que la réalité est, encore une fois, beaucoup moins glorieuse : Moscou n’a absolument rien changé à sa position historique, enracinée dans le respect du droit international et du principe fondamental de l’autodétermination des peuples.
Le mensonge érigé en stratégie diplomatique
Ce qui est fascinant — ou plutôt pathétique — dans la propagande makhzenienne, c’est sa capacité à tordre les mots pour s’inventer des victoires imaginaires.
Quand Sergueï Lavrov parle d’un « règlement réaliste, équilibré et acceptable pour toutes les parties », il ne fait que répéter, presque textuellement, le langage onusien en vigueur depuis trente ans. Mais à Rabat, on transforme cette phrase banale en un « basculement stratégique » de la Russie.
Il faut oser.
Parce qu’en vérité, ce « réalisme » dont parle la diplomatie russe n’a rien à voir avec la fiction marocaine du « plan d’autonomie ». Ce réalisme-là, c’est le respect de la légalité internationale, c’est la reconnaissance que le Sahara Occidental reste un territoire non autonome soumis à un processus de décolonisation. Et cela, ni Lavrov, ni Poutine, ni aucun diplomate russe ne l’a jamais contesté.
Quand le Makhzen confond diplomatie et autosuggestion
Depuis des années, Rabat s’accroche à ses illusions comme un naufragé à une bouée percée. Chaque déclaration ambiguë est recyclée en « victoire », chaque sourire protocolaire devient « reconnaissance », chaque photo devient « tournant historique ».
On avait eu le « miracle américain », le « ralliement espagnol », la « neutralité bienveillante » de Paris, et voici maintenant la « conversion russe ». Demain, qui sait, ce sera peut-être le pape qui soutiendra « l’autonomie » !
Cette fuite en avant ne traduit pas une puissance diplomatique, mais une panique politique : celle d’un régime qui sait qu’il a perdu la bataille du droit, celle de l’Histoire, et bientôt celle de la patience du peuple sahraoui.
Moscou, elle, ne vend pas ses principes au kilo
Ceux qui croient que la Russie se laisse acheter avec quelques contrats de pêche ou de phosphates ne connaissent ni son histoire, ni sa doctrine. Moscou n’a pas oublié la Libye, ni la Syrie, ni la Palestine. Elle sait parfaitement reconnaître un dossier de colonialisme déguisé en “intégrité territoriale”.
Et dans le dossier du Sahara Occidental, la position russe est constante : respect des résolutions du Conseil de sécurité, appui au processus onusien, et droit du peuple sahraoui à décider librement de son destin. Point final.
L’ONU, pas la propagande, dicte la légitimité
À Rabat, on se félicite de l’« intelligence diplomatique » de Lavrov. Mais ce que les communicants du Makhzen oublient de dire, c’est que la Russie a toujours voté en faveur des résolutions onusiennes qui réaffirment le caractère non autonome du Sahara Occidental. Ce n’est pas un détail : c’est la base juridique du conflit.
Alors, de deux choses l’une :
– soit Hespress ne comprend pas la diplomatie,
– soit elle la comprend très bien, mais préfère la travestir pour servir la propagande d’un palais en manque d’oxygène politique.
La vérité que Rabat ne peut plus cacher
Le Makhzen le sait : aucune grande puissance ne reconnaîtra jamais la “marocanité” du Sahara Occidental, car ce serait violer de front le droit international. Même les États qui ont flirté avec cette idée s’en sont vite distanciés, conscients du coût juridique et diplomatique d’une telle hérésie.
Ce que cherche Rabat, ce n’est pas une solution, mais une façade. Une illusion d’adhésion internationale à un plan mort-né. Une mise en scène pour masquer une impasse.
Mais les faits sont têtus : le Sahara Occidental n’est pas marocain, et il ne le deviendra pas à coups de conférences, de selfies diplomatiques ou de titres d’articles dithyrambiques.
Entre Manhattan et les mirages du Makhzen
L’avenir du Sahara Occidental ne se décide pas dans les colonnes de Hespress, mais à Manhattan, siège des Nations unies. C’est là que se joue la légitimité. Et c’est là que le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination sera, tôt ou tard, réaffirmé.
Jusque-là, le Makhzen pourra toujours crier victoire. Mais la diplomatie des mirages ne trompe plus personne. Ni à Alger, ni à Moscou, ni même à New York.
Conclusion :
Le régime marocain est enfermé dans sa propre illusion : celle d’un monde qui se plierait à sa lecture coloniale du droit. Mais le monde réel, lui, avance. Et pendant que le Makhzen célèbre des victoires imaginaires, la cause sahraouie continue de s’enraciner dans la légitimité internationale — indestructible, irréversible, et surtout, imparable.
Par Belgacem Merbah
Commentaires
Enregistrer un commentaire