L’ambiguïté algérienne et l’audace européenne : comment l’Algérie facilite elle-même les affronts diplomatiques
Ce jeudi après-midi, le ministre belge de la Coopération, M. Prévot, a publiquement soutenu le « plan d’autonomie marocain » pour le Sahara occidental, un projet illégal au regard du droit international et contraire à la position historique de l’Algérie.
Quelques heures plus tard, le même responsable appelait pourtant son homologue algérien, Ahmed Attaf, pour discuter « sereinement » de coopération dans des domaines comme les énergies renouvelables, le transport, les mines, l’agroalimentaire ou encore les produits pharmaceutiques.
Deux séquences incohérentes, mais révélatrices : ce n’est pas M. Prévot qui est ambigu, c’est l’Algérie qui n’a pas de ligne claire.
Quand la confusion stratégique devient une constante
Cette scène absurde — un ministre européen soutenant le Maroc avant de tendre la main à l’Algérie — ne se produit pas par hasard. Elle traduit une perception bien ancrée à Bruxelles et dans d’autres capitales européennes : l’Algérie ne sait pas ce qu’elle veut vraiment.
Notre diplomatie se veut fière et souveraine, mais elle reste floue sur ses priorités.
Un jour, elle revendique la neutralité sur le Sahara occidental pour ne pas être perçue comme partie au conflit ; le lendemain, elle dénonce l’occupation marocaine sans pour autant mobiliser ses leviers diplomatiques, économiques ou médiatiques pour peser réellement.
Ce flou stratégique est interprété à l’extérieur comme une ouverture à la manipulation : les Européens savent qu’ils peuvent ménager le Maroc tout en conservant leurs intérêts économiques avec Alger — sans jamais en payer le prix politique.
Les Européens jouent, l’Algérie subit
Ce que fait la Belgique n’est que la suite logique d’un schéma plus large : l’Europe avance ses pions en fonction de ses intérêts, en jouant sur les contradictions internes des pays maghrébins.
Rabat a une diplomatie cohérente, même si elle est fondée sur le mensonge et la propagande : elle a un message, un objectif, et une stratégie de séduction internationale.
Alger, au contraire, oscille entre principe et prudence, entre affirmation et retenue, entre indignation verbale et passivité pratique.
Cette incohérence donne aux Européens le confort d’un double jeu : ils soutiennent ouvertement le Maroc tout en courtisant l’Algérie pour ses ressources, son marché et son rôle énergétique.
Et l’Algérie, faute d’une doctrine ferme, accepte de discuter avec ceux qui viennent de la provoquer.
Un vide de doctrine nationale
La racine du problème est simple : l’Algérie n’a jamais défini clairement où se situent ses lignes rouges diplomatiques.
On réagit au cas par cas, avec des communiqués de circonstance, sans stratégie d’ensemble ni articulation entre diplomatie politique et diplomatie économique.
Tant que cette cohérence manquera, les partenaires étrangers continueront à tester les limites algériennes — et à en profiter.
Conclusion : la fermeté n’est pas un slogan, c’est une politique
Si l’Algérie veut se faire respecter, elle doit redéfinir ses priorités nationales et conditionner toute coopération économique à un respect strict de ses intérêts fondamentaux, à commencer par le dossier du Sahara occidental.
Ce n’est pas un luxe patriotique, c’est une nécessité stratégique.
Tant que nous continuerons à parler d’« amitié » avec ceux qui soutiennent nos adversaires, nous serons condamnés à l’humiliation diplomatique.
L’Europe ne nous manque pas de respect par ignorance.
Elle le fait parce que nous-mêmes n’avons pas encore décidé d’être respectés.
Par Belgacem Merbah
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