La place de l’Algérie dans les rapports internationaux : entre constance des principes et réalités géopolitiques
L’affirmation selon laquelle « les grandes puissances, y compris la Russie, ne donnent aucun poids à l’Algérie » relève d’une vision simpliste et déconnectée des dynamiques géopolitiques réelles. Une telle perception occulte les choix stratégiques opérés par les États du Maghreb et leurs conséquences sur le positionnement international. Elle ignore surtout que le soutien dont bénéficie le Maroc auprès de certaines puissances n’est pas gratuit : il s’achète au prix de concessions majeures sur des questions de souveraineté et de principes.
Le Maroc : une diplomatie de troc
Le Maroc a choisi une diplomatie pragmatique, mais profondément transactionnelle. Son rapprochement avec certaines puissances occidentales, notamment les États-Unis et Israël, repose sur deux axes essentiels :
- La reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, obtenue en contrepartie de la normalisation avec Israël dans le cadre des Accords d’Abraham.
- L’ouverture stratégique aux intérêts militaires et économiques étrangers, y compris dans des zones sensibles, offrant ainsi un accès privilégié à des acteurs extérieurs.
Ces choix, s’ils assurent au Maroc une visibilité immédiate, posent une question fondamentale : celle de la souveraineté nationale et de la fidélité aux principes de solidarité régionale et internationale.
L’Algérie : la constance des principes
À l’opposé, l’Algérie a fait le choix d’une diplomatie fondée sur des valeurs immuables :
- Le soutien indéfectible au droit des peuples à l’autodétermination, en particulier pour la cause sahraouie.
- Le refus catégorique de toute normalisation avec Israël, tant que la question palestinienne demeure non résolue.
- La défense intransigeante de la souveraineté nationale, même au prix d’un isolement relatif ou d’un manque de soutien explicite de certaines puissances.
Cette posture, loin d’être un handicap, confère à l’Algérie une crédibilité morale et une constance stratégique reconnues dans des instances comme l’Union africaine et le Mouvement des non-alignés.
Les grandes puissances : la logique des intérêts
Il est indéniable que les grandes puissances agissent selon leurs intérêts géostratégiques et économiques. Dans ce cadre, un pays qui refuse la logique du troc diplomatique peut sembler moins « utile » à court terme. Mais cette lecture est réductrice.
L’Algérie demeure un acteur incontournable par :
- Son rôle stabilisateur dans la région sahélo-maghrébine.
- Ses ressources énergétiques stratégiques, vitales pour l’Europe et l’Asie.
- Ses relations équilibrées avec plusieurs pôles de puissance, notamment la Chine et la Russie.
L’influence algérienne ne se mesure pas à l’aune des faveurs occidentales, mais à sa capacité à préserver son indépendance et à peser dans les équilibres régionaux.
Conclusion
Réduire la place de l’Algérie à une absence de considération des grandes puissances est une erreur d’analyse. Si le Maroc a choisi la voie des concessions pour obtenir un soutien diplomatique, l’Algérie a opté pour la fidélité à ses principes, quitte à sacrifier un rayonnement immédiat. Ce choix, loin d’être une faiblesse, constitue une force dans un monde où les alliances fluctuent et où la constance devient une valeur rare. L’Algérie, par sa souveraineté préservée et son rôle stabilisateur, reste un pilier stratégique dans l’échiquier international.
Par Belgacem Merbah
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