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Le mirage des F-35 marocains : entre intox médiatique et réalité géopolitique

Une nouvelle fois, la machine de propagande marocaine tente de fabriquer des « victoires militaires » imaginaires, en relayant des rumeurs sensationnalistes sur l’acquisition de 32 avions F-35 américains. L’article publié par Assahifa et attribué au site Military Africa s’inscrit dans une stratégie de communication bien rodée : gonfler artificiellement les capacités du royaume pour impressionner l’opinion publique locale et nourrir une guerre psychologique contre l’Algérie.


1. Military Africa : un relais douteux de la DGED

Contrairement à ce que laisse entendre Assahifa, Military Africa n’est pas un site de référence indépendant. Il s’agit d’une vitrine douteuse, fonctionnant selon les mêmes méthodes que Sahel Intelligence ou d’autres plateformes fantômes créées par la DGED marocaine.

Ces sites ont pour rôle :
  • de publier des « révélations » prétendument neutres sur les questions militaires,
  • de relayer de fausses informations visant l’Algérie et ses voisins,
  • puis d’être repris par la presse marocaine comme des sources fiables.
Nous sommes donc face à un schéma classique de désinformation, et non à une analyse stratégique crédible.



2. L’impossible acquisition des F-35

L’annonce de cette « méga-commande » de F-35 se heurte à plusieurs réalités incontournables :
  • Le verrou israélien : Les États-Unis appliquent depuis toujours le principe du Qualitative Military Edge (QME *), qui garantit la supériorité technologique d’Israël dans la région. Même les Émirats arabes unis, pourtant alliés stratégiques de Washington et signataires des accords d’Abraham, ont vu leur projet d’acquérir des F-35 bloqué. Imaginer que le Maroc, dont le poids diplomatique et économique est sans commune mesure, puisse franchir cet obstacle relève du fantasme.
  • Le coût astronomique : Les chiffres évoqués – « 17 milliards de dollars sur 45 ans » – sont irréalistes. Le coût réel d’acquisition, d’entretien et de mise à niveau de ces appareils dépasse largement ce montant. Pour un pays qui croule sous la dette extérieure et dont l’économie dépend de financements étrangers, un tel engagement relève de l’impossible.
  • Les infrastructures et la formation : Le F-35 n’est pas un avion que l’on intègre facilement. Il exige un écosystème complexe de communication, de commandement, de logistique et de maintenance. Le Maroc, dépendant entièrement de ses fournisseurs étrangers, n’a ni les moyens ni la souveraineté technologique pour assumer un tel défi.

3. Une propagande à usage interne et externe

La campagne autour du F-35 poursuit un double objectif :
  • À l’intérieur du Maroc : nourrir l’illusion d’une armée moderne et invincible, afin de détourner l’attention de la population des crises sociales et économiques croissantes.
  • À l’extérieur : envoyer des signaux psychologiques à l’Algérie en prétendant combler l’écart technologique.
Cette stratégie, bien connue, ne repose sur aucun fait tangible. Elle illustre plutôt la dépendance marocaine à la communication et aux effets d’annonce pour masquer sa vulnérabilité structurelle.

4. L’Algérie : le choix du réalisme

À l’opposé de ce théâtre médiatique, l’Algérie avance selon une logique pragmatique :
  • modernisation progressive de son arsenal aérien avec des appareils éprouvés tels que les Su-57 et Su-35,
  • diversification des partenariats technologiques avec la Russie et la Chine,
  • développement de ses propres capacités industrielles et de drones armés,
  • formation de ses pilotes et ingénieurs dans un cadre souverain.
Cette approche n’a pas besoin de campagnes médiatiques spectaculaires : elle s’appuie sur une doctrine défensive claire et sur une vision stratégique de long terme.

Conclusion

L’« acquisition » marocaine de F-35 n’existe que dans les colonnes des médias contrôlés par la DGED. Washington n’a jamais validé, ni même envisagé, un tel transfert qui compromettrait l’équilibre régional et le principe du QME au profit d’Israël.

Ces rumeurs ne traduisent donc pas une montée en puissance réelle du Maroc, mais plutôt un symptôme de son insécurité chronique et de son recours compulsif à la propagande.

Face à ces illusions, l’Algérie reste fidèle à une ligne de conduite sobre, réaliste et souveraine : construire sa défense sur des faits et non sur des fables.


Par Belgacem Merbah



(*) Qualitative Military Edge : 
Selon le think tank américain pro-israélien Washington Institute for Near East Policy (WINEP), l’avantage militaire qualitatif (Qualitative Military Edge, QME) est un concept de la politique étrangère des États-Unis. Les États-Unis s’engagent à maintenir l’avantage militaire qualitatif d’Israël — c’est-à-dire les avantages technologiques, tactiques et autres qui lui permettent de dissuader des adversaires numériquement supérieurs, selon le WINEP. Cette politique est définie dans la législation américaine actuelle.

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