Accéder au contenu principal

Le faux cessez-le-feu entre l’Iran et Israël : un répit stratégique pour Tel-Aviv, un engrenage géopolitique mondial

Paré des oripeaux de la paix, le cessez-le-feu imposé entre l’Iran et Israël n’est qu’un leurre stratégique, un écran de fumée destiné à masquer une opération de sauvetage d’urgence au profit de l’armée israélienne, en voie d’effondrement après les représailles ciblées et d’une efficacité redoutable de l’Iran. Derrière la rhétorique pacifiste d’un Donald Trump en quête d’un second souffle sur la scène intérieure américaine, se trame une manœuvre géopolitique de grande envergure, à la fois périlleuse et explosive pour l’ordre régional et mondial.

 

Une trêve imposée pour sauver l’armée israélienne

Le timing du cessez-le-feu est révélateur : à peine quelques heures après la riposte iranienne sur la base américaine d’Al-Udeid au Qatar – en réponse à une attaque aérienne américaine contre des installations nucléaires iraniennes –, les États-Unis ont exigé un arrêt immédiat des hostilités. Cette précipitation, sous couvert de désescalade, cache en réalité un constat accablant dressé par les états-majors américains : Tsahal, l’armée israélienne réputée invincible, vacille.

Ses batteries anti-missiles surchargées, ses entrepôts de munitions en tension, ses lignes de commandement sous pression et ses soldats moralement éprouvés, Israël n’était plus en mesure de soutenir un conflit prolongé face à un Iran déterminé et technologiquement mieux préparé que prévu. La trêve, loin d’être un acte de bonne volonté, répondait à un impératif vital : permettre à l’appareil militaire israélien de se réarmer, se redéployer et se réorganiser.

La stratégie israélienne : impliquer les États-Unis dans un conflit à long terme

Les observateurs avisés s’accordent à dire que cette pause ne signifie en rien un recul israélien, mais plutôt une transition vers une guerre plus insidieuse, hybride et prolongée. Netanyahou, qui n’a pas atteint ses objectifs militaires immédiats, entend désormais déplacer le conflit sur d’autres terrains : diplomatique, médiatique, cybernétique et asymétrique.

En usant de son influence tentaculaire à Washington, Tel-Aviv pousse les faucons de la Maison-Blanche à faire porter à l’Iran la responsabilité d’un éventuel effondrement du cessez-le-feu, tout en exerçant des pressions sur les régimes arabes alignés, pour qu’ils prennent fait et cause contre Téhéran. Le scénario est connu : provoquer, accuser, sanctionner et isoler.

Vers une reproduction du modèle irakien : la destruction de l’État iranien

Le dessein israélien est limpide. Il s’agit, à terme, de reproduire contre l’Iran les schémas de destruction étatique appliqués à l’Irak, à la Libye et à la Syrie. En affaiblissant progressivement l’État iranien, en favorisant les troubles internes et les actes de sabotage ciblés, Israël espère éliminer son rival stratégique numéro un dans la région. Une fois cela accompli, Tel-Aviv pourrait s’imposer comme hégémon incontesté du Moyen-Orient… avant de projeter ses ambitions vers l’Afrique du Nord, à travers le Maroc, déjà engagé dans une coopération militaire et sécuritaire accrue avec Israël.

Ce pivot africain n’est pas anodin : il permettrait à Israël de prendre position sur les routes atlantiques, de contrôler les flux migratoires et énergétiques et de faire pression sur les États du Sahel et du Maghreb, notamment l’Algérie.

Donald Trump, président de guerre malgré lui

Englué dans une crise intérieure et confronté à une opinion publique américaine de plus en plus hostile à toute nouvelle aventure militaire, Donald Trump semble pourtant avoir cédé aux sirènes de Netanyahou. Le cessez-le-feu lui permet d’afficher une fausse victoire diplomatique, mais en réalité, il s’agit d’un piège. Car toute reprise des hostilités entraînera automatiquement les États-Unis dans un conflit aux conséquences régionales et globales désastreuses.

Loin de consolider son image, cette posture affaiblit l’homme du Bureau ovale, dont les promesses électorales de paix apparaissent aujourd’hui comme un mirage. Trump devient ainsi le jouet d’un Premier ministre israélien obsédé par sa survie politique, prêt à plonger la région et le monde dans le chaos pour éviter la prison et suspendre sine die les échéances démocratiques en Israël, comme le fait Volodymyr Zelensky en Ukraine.

L’effet boomerang sur les pays du Golfe

L’alignement stratégique des monarchies du Golfe sur le couple Trump-Netanyahou pourrait bien se transformer en suicide politique. Le Qatar, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite, qui ont injecté des centaines de milliards de dollars dans l’économie américaine et participé activement à l’armement d’Israël, risquent de devenir les cibles prioritaires de la contre-offensive iranienne.

Les missiles iraniens restent braqués sur les bases américaines dans la région. Et en cas de reprise du conflit, Téhéran n’hésitera pas à frapper les infrastructures vitales de ces États. Le détroit d’Ormuz, par lequel transite près d’un tiers du pétrole mondial, serait fermé, provoquant une onde de choc économique mondiale.

La Russie en embuscade

Vladimir Poutine, lucide face aux manœuvres américaines, a refusé de mordre à l’hameçon. En guise de réponse au double-jeu occidental, la Russie a intensifié ses frappes contre Kiev, siège de la guerre par procuration de l’OTAN. En bombardant massivement les infrastructures militaires ukrainiennes, Moscou a envoyé un message clair à Paris, Berlin et Londres : toute tentative d’embrasement au Moyen-Orient trouvera une réplique sur le front européen.

Poutine montre ainsi que la Russie n’est pas prête à céder son influence dans la région, ni à laisser Washington redessiner seul les équilibres géopolitiques du monde post-occidental.

Conclusion : Une paix de façade, une guerre en gestation

Le cessez-le-feu entre l’Iran et Israël ne met pas fin à la guerre. Il en constitue seulement une pause tactique, destinée à permettre aux protagonistes de se réarmer, de réorganiser leurs alliances et de redéfinir leurs objectifs. Le Moyen-Orient reste une poudrière, et la moindre étincelle – volontaire ou provoquée – pourrait rallumer l’incendie.

Entre les ambitions hégémoniques d’Israël, les calculs électoraux de Donald Trump, les pressions du lobby sioniste, la fragilité des régimes arabes et l’affirmation stratégique de la Russie, le monde s’avance sur une ligne de crête, où le moindre faux pas pourrait mener à un conflit mondial à plusieurs foyers. Ce n’est pas la paix qui a triomphé, mais le répit avant la tempête.


Par Belgacem Merbah



Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

La CIA déclassifie un document qui permet de comprendre les véritables motivations du Maroc dans la guerre des sables de 1963

Le 23 août 1957, un document confidentiel de la CIA a été rédigé, dévoilant des éléments cruciaux sur la politique française vis-à-vis de l’Algérie, alors en pleine guerre d’indépendance. Récemment déclassifié, ce document éclaire d’un jour nouveau les intentions de la France concernant les zones pétrolifères sahariennes et ses stratégies post-indépendance. À travers des manœuvres diplomatiques, économiques et géopolitiques, Paris cherchait à préserver son contrôle sur cette région stratégique. Un Sahara Algérien Indispensable à la France Selon ce document, la France considérait le Sahara algérien comme un territoire d’une importance capitale, non seulement pour ses ressources pétrolières et gazières, mais aussi pour son positionnement stratégique en Afrique du Nord. Dans cette optique, Paris envisageait de maintenir coûte que coûte sa mainmise sur la région, en la dissociant administrativement du reste de l’Algérie. Cette politique s’est concrétisée en 1957 par la création de deux dép...

Supériorité des F-16 marocains sur les Su-30 algériens : Un déséquilibre stratégique inquiétant ?

Le rapport de force militaire entre le Maroc et l’Algérie constitue un enjeu stratégique majeur en Afrique du Nord. Depuis des décennies, les deux nations s’engagent dans une course à l’armement, mettant un accent particulier sur la modernisation de leurs forces aériennes. Cependant, une nouvelle dynamique semble se dessiner avec la montée en puissance de l’aviation marocaine, renforcée par l’acquisition des F-16V Block 70 , livrés en 2023, et des missiles AIM-120C/D . Pendant ce temps, l’Algérie peine à moderniser sa flotte de Su-30MKA, toujours limitée par l’absence de missiles longue portée de dernière génération , ce qui pourrait progressivement redéfinir l’équilibre aérien dans la région. Cette asymétrie soulève plusieurs préoccupations : Le Maroc pourrait exploiter cet avantage pour adopter une posture plus agressive , comme ce fut le cas par le passé. L'Algérie se retrouve exposée à une éventuelle suprématie aérienne marocaine , en particulier dans un scénario de conflit. Le...

Le Mythe du Soutien Marocain à la Révolution Algérienne : Une Histoire de Calculs et d’Opportunisme

L’histoire des relations entre le Maroc et la Révolution algérienne est souvent déformée par une propagande soigneusement entretenue par le régime marocain. Cette version des faits présente Mohamed V comme un allié indéfectible du peuple algérien dans sa lutte pour l’indépendance. Pourtant, une analyse minutieuse des événements démontre que ce soutien n’était ni désintéressé, ni motivé par une réelle solidarité. Il s’agissait avant tout d’un levier diplomatique visant à consolider le pouvoir du souverain marocain et à servir les ambitions territoriales du royaume chérifien. Un Soutien Dicté par des Intérêts Stratégiques Lorsque la Guerre d’Algérie éclate en 1954, le Maroc, fraîchement indépendant depuis 1956, se trouve dans une position délicate. Mohamed V cherche à asseoir son autorité dans un pays encore fragile, marqué par des tensions internes et des incertitudes quant à son avenir politique. Dans ce contexte, le soutien à la lutte algérienne contre la France devient un outil de né...