La France n’a pas réellement eu le choix dans son rapprochement avec le Maroc, car son modèle de politique étrangère, en particulier en Afrique, repose sur une logique néocoloniale qui ne correspond plus aux aspirations de l’Algérie depuis l’arrivée au pouvoir du Président Abdelmadjid Tebboune.
Depuis 2019, Alger a entrepris une rupture progressive avec l’influence française, en démantelant les réseaux historiques qui liaient encore les deux pays. Face à cette perte d’influence, Paris s’est tourné vers son allié traditionnel, le Maroc, non pas comme une alternative stratégique, mais comme un moyen de pression contre l’Algérie.
Mais en réalité, la France a toujours favorisé le Maroc, et ce depuis 1962, pour des raisons géopolitiques, économiques et militaires. Ce rapprochement avec Rabat ne date donc pas d’aujourd’hui, mais il a été renforcé récemment en réponse à la politique souverainiste de l’Algérie.
1. La France et l’Afrique : un modèle néocolonialiste en crise
La politique africaine de la France repose historiquement sur une logique de domination et de contrôle, qui lui a permis de maintenir son influence sur ses anciennes colonies bien après leur indépendance.
a) Une influence basée sur le pillage des ressources
Contrairement à d’autres puissances comme la Chine, la Russie ou la Turquie, qui investissent en Afrique avec des projets de développement économique et de partenariats industriels, la France a toujours privilégié :
- L’exploitation des ressources naturelles, sans industrialisation locale.
- Le maintien d’une élite politique favorable à Paris, pour garantir ses intérêts.
- L’absence de transfert de technologies, afin d’éviter l’émergence de puissances régionales autonomes.
L’Algérie, forte de son histoire anti-coloniale, s’est toujours méfiée de ce modèle et a cherché à diversifier ses partenariats pour éviter toute dépendance vis-à-vis de la France.
b) L’Algérie a mis fin aux réseaux d’influence français
Depuis son indépendance, l’Algérie a résisté aux pressions françaises, mais c’est sous Tebboune que la rupture a été la plus radicale :
- Élimination des relais d’influence français en Algérie.
- Refus des contrats économiques déséquilibrés, exigeant désormais des investissements durables et des transferts de savoir-faire.
- Diversification des partenariats, avec un virage vers la Chine, la Russie, la Turquie et les États du Golfe.
Face à cette perte d’influence, la France a réagi en renforçant son alliance avec le Maroc, un pays où elle garde un contrôle total sur l’économie et la politique.
2. Le Maroc : un État sous influence française
Contrairement à l’Algérie, qui impose des conditions strictes à ses partenaires, le Maroc est resté dans une relation de dépendance vis-à-vis de Paris. Cette relation est structurée par des accords stratégiques secrets qui garantissent à la France une mainmise sur l’économie marocaine.
a) Les accords de "La Celle-Saint-Cloud" : un engagement jusqu’en 2056
Les accords signés entre la France et le Maroc en 1956, lors de l’indépendance du royaume, placent le pays dans une situation d’interdépendance avec Paris jusqu’en 2056. Ces accords, rarement évoqués dans les médias, imposent :
- Un contrôle économique français sur le Maroc, notamment dans les secteurs clés (banque, télécoms, énergie).
- Une influence politique directe, via le soutien de la monarchie chérifienne.
- Un engagement militaire et sécuritaire, qui oblige Rabat à rester aligné sur les intérêts stratégiques français.
En d’autres termes, le Maroc n’a jamais été un choix de substitution à l’Algérie, car il a toujours été sous tutelle française.
b) Un pays qui ne conteste pas la politique française
Contrairement à l’Algérie, qui impose des conditions strictes aux investisseurs étrangers, le Maroc accepte sans problème :
- L’exploitation de ses ressources sans contrepartie.
- Une mainmise française sur ses infrastructures stratégiques.
- L’absence de réelles politiques de développement industriel, ce qui empêche le Maroc de devenir une puissance régionale autonome.
Ce positionnement fait du Maroc un allié fiable pour la France, contrairement à l’Algérie qui revendique une relation basée sur le respect mutuel et la souveraineté.
3. Un chantage politique contre l’Algérie ?
En renforçant son soutien à Rabat, la France tente d’exercer une pression sur Alger pour la forcer à faire des concessions sur plusieurs dossiers :
- Le Sahara occidental : La France soutient de plus en plus ouvertement la position marocaine, dans le but d’affaiblir Alger, principal soutien du Front Polisario.
- L’influence régionale : Paris tente de marginaliser l’Algérie en promouvant le Maroc comme partenaire privilégié en Afrique et au Sahel.
- Les relations économiques : En mettant en avant le Maroc, la France cherche à pousser l’Algérie à assouplir sa politique d’investissements pour permettre un retour des entreprises françaises sous des conditions plus favorables à Paris.
Mais cette stratégie ne fonctionne pas car l’Algérie reste ferme sur ses principes :
- Aucune concession sur le Sahara occidental.
- Pas de retour aux anciens réseaux d’influence français.
- Refus d’une relation déséquilibrée avec Paris.
Ce bras de fer explique les tensions actuelles entre la France et l’Algérie, qui ne cédera pas aux pressions extérieures.
4. Une continuité historique : la France a toujours favorisé le Maroc
Loin d’être un revirement soudain, le soutien français au Maroc est une constante historique.
a) Un soutien militaire contre l’Algérie
- Guerre des Sables (1963) : La France a soutenu militairement le Maroc contre l’Algérie fraîchement indépendante.
- Conflit du Sahara occidental (depuis 1975) : Paris a toujours soutenu Rabat dans sa guerre contre le Front Polisario, en fournissant des armes et un appui diplomatique.
b) Des investissements massifs au Maroc
Depuis 1962, la France a investi massivement au Maroc, notamment dans :
- Les infrastructures de transport (ports, autoroutes).
- Le secteur bancaire et financier, où elle contrôle encore aujourd’hui la majorité des banques marocaines.
- Les entreprises stratégiques, avec une forte présence dans l’énergie et les télécoms.
À l’inverse, en Algérie, la France a toujours préféré des relations purement commerciales, refusant d’investir sur le long terme ou de transférer des technologies.
Conclusion : Une stratégie vouée à l’échec
Le renforcement des liens entre la France et le Maroc ne reflète pas un véritable choix stratégique, mais plutôt une tentative de chantage sur l’Algérie.
Cependant, cette stratégie est inefficace :
- L’Algérie est aujourd’hui un acteur incontournable en Afrique, avec une diplomatie indépendante.
- Le Maroc, malgré le soutien français, peine à s’imposer comme une puissance régionale.
- La France perd progressivement son emprise sur l’Afrique du Nord, faute d’adapter sa politique à la nouvelle réalité géopolitique.
Tant que Paris restera dans une logique néocoloniale et non de coopération mutuelle, ses relations avec Alger resteront tendues et conflictuelles.
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