Accéder au contenu principal

La stratégie du Makhzen marocain : Entre appropriation culturelle et falsification de l’histoire

Depuis des décennies, une bataille culturelle silencieuse mais acharnée se joue en Afrique du Nord, opposant notamment l’Algérie et le Maroc. À travers une série d’appropriations culturelles flagrantes, le régime marocain, souvent surnommé le Makhzen, poursuit ses tentatives pour s’approprier des éléments du patrimoine algérien, les présentant comme faisant partie intégrante de l’héritage marocain. Cette lutte s’étend à divers aspects de la culture, qu’il s’agisse de l’art, de la gastronomie, des traditions vestimentaires ou des expressions artistiques. L’un des derniers exemples en date est lié au zellige algérien, un symbole historique et artistique profondément enraciné dans l’histoire de l’Algérie.

L’appropriation du zellige algérien : un nouvel épisode de controverse

Récemment, la Fédération Royale Marocaine de Football (FRMF) a dévoilé le logo officiel de la Coupe d’Afrique des Nations 2025, que le Maroc accueillera du 21 décembre 2025 au 18 janvier 2026. Ce logo arbore un motif de zellige, revendiqué par les autorités marocaines comme étant un élément de leur patrimoine. Plus surprenant encore, la mascotte de la compétition elle-même a été ornée de ces motifs traditionnels, que la propagande médiatique marocaine présente comme issus de “l’héritage marocain”.

Cependant, un simple coup d’œil aux archives historiques suffit pour réfuter cette affirmation. Le zellige, tel qu’il est connu aujourd’hui, trouve ses origines en Algérie et remonte à des siècles, bien avant l’émergence des revendications marocaines modernes. Ce motif artistique est lié aux dynasties et aux cultures qui ont marqué l’histoire algérienne, notamment celle des Hammadites. Une pièce authentique de zellige algérien est d’ailleurs exposée au célèbre Musée du Louvre, en France. Elle provient de la Qalâa des Beni Hammad, un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO et situé dans l’actuelle wilaya de M’Sila, en Algérie. Cette preuve tangible confirme que ce patrimoine appartient indéniablement à l’histoire algérienne.

L'empreinte algérienne du zellige dans le monde

L’Algérie a toujours été un berceau de civilisations riches et diverses, et le zellige ne fait pas exception. Des motifs distinctifs, comme la célèbre étoile à huit branches, ornent des édifices historiques algériens, témoins de l’expertise artisanale algérienne à travers les siècles. Cette étoile spécifique, qui orne notamment le Musée de Cherchell, illustre la maîtrise et la créativité des artisans algériens depuis plus de 1 600 ans. Ces éléments du patrimoine sont une preuve vivante de l’authenticité et de l’antériorité de cette tradition artistique en Algérie.

De plus, le zellige a été incorporé dans de nombreux aspects de la culture contemporaine algérienne, notamment à travers les uniformes de l’équipe nationale de football. En 2022, les Fennecs (l’équipe algérienne) avaient fièrement arboré des maillots inspirés du motif du zellige, mettant ainsi en lumière l’identité algérienne et sa riche histoire.

Une tentative systématique d’appropriation du patrimoine algérien

Le cas du zellige n’est qu’un exemple parmi d’autres dans la stratégie du Makhzen visant à s’approprier des éléments de l’héritage algérien. Cette tentative de falsification historique n’est pas isolée, mais bien enracinée dans une démarche systématique. D’autres symboles du patrimoine algérien ont également été ciblés, comme le couscous, le caftan, le hâïk, et même des formes musicales telles que le raï, un genre né dans l’ouest algérien. À chaque fois, le Maroc tente de redéfinir ces éléments comme étant partie intégrante de sa propre culture, souvent en mobilisant des campagnes de communication massives et bien orchestrées à l’échelle internationale.

Cette attitude s’explique en partie par une volonté politique du Makhzen de consolider son image culturelle et touristique sur la scène mondiale, souvent au détriment de la vérité historique. Cependant, l’histoire, les archives, et les preuves matérielles ne laissent aucun doute sur l’origine de ces éléments culturels : ils sont algériens.

Pourquoi le Makhzen persiste-t-il dans ces démarches ?

La réponse à cette question pourrait résider dans des considérations politiques et stratégiques. En effet, en s’appropriant des éléments du patrimoine algérien, le régime marocain cherche non seulement à enrichir son propre récit national, mais également à éclipser l’influence culturelle et historique de l’Algérie dans la région. Cette quête de légitimité culturelle s’inscrit dans un contexte de rivalité géopolitique entre les deux nations, exacerbée par des différends historiques et territoriaux.

Résister par la préservation et la valorisation du patrimoine

Face à ces tentatives répétées d’appropriation, il est essentiel pour l’Algérie de continuer à préserver, valoriser et promouvoir son patrimoine culturel. Cela passe par des actions concrètes, telles que la documentation historique, la sensibilisation des nouvelles générations, et la mise en avant de ces trésors culturels sur la scène internationale. Les institutions algériennes, appuyées par des experts en histoire et en art, jouent un rôle crucial dans la défense de ce patrimoine.

Par ailleurs, l’Algérie peut s’appuyer sur des outils internationaux, tels que l’UNESCO, pour protéger et certifier l’authenticité de son héritage. Les initiatives visant à inscrire davantage de sites et de traditions algériens au patrimoine mondial de l’humanité constituent une arme puissante contre ces appropriations culturelles.

En conclusion

Les tentatives du Makhzen de s’approprier des éléments du patrimoine algérien, qu’il s’agisse du zellige, du couscous, ou du raï, reflètent une stratégie politique et culturelle visant à redéfinir l’histoire et l’identité nord-africaine. Cependant, face à ces démarches, l’Algérie dispose d’une richesse historique et patrimoniale incontestable, soutenue par des preuves tangibles et une reconnaissance internationale. Il appartient désormais à l’Algérie de continuer à affirmer sa souveraineté culturelle et à faire entendre sa voix dans la défense de son patrimoine.



Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

La CIA déclassifie un document qui permet de comprendre les véritables motivations du Maroc dans la guerre des sables de 1963

Le 23 août 1957, un document confidentiel de la CIA a été rédigé, dévoilant des éléments cruciaux sur la politique française vis-à-vis de l’Algérie, alors en pleine guerre d’indépendance. Récemment déclassifié, ce document éclaire d’un jour nouveau les intentions de la France concernant les zones pétrolifères sahariennes et ses stratégies post-indépendance. À travers des manœuvres diplomatiques, économiques et géopolitiques, Paris cherchait à préserver son contrôle sur cette région stratégique. Un Sahara Algérien Indispensable à la France Selon ce document, la France considérait le Sahara algérien comme un territoire d’une importance capitale, non seulement pour ses ressources pétrolières et gazières, mais aussi pour son positionnement stratégique en Afrique du Nord. Dans cette optique, Paris envisageait de maintenir coûte que coûte sa mainmise sur la région, en la dissociant administrativement du reste de l’Algérie. Cette politique s’est concrétisée en 1957 par la création de deux dép...

Supériorité des F-16 marocains sur les Su-30 algériens : Un déséquilibre stratégique inquiétant ?

Le rapport de force militaire entre le Maroc et l’Algérie constitue un enjeu stratégique majeur en Afrique du Nord. Depuis des décennies, les deux nations s’engagent dans une course à l’armement, mettant un accent particulier sur la modernisation de leurs forces aériennes. Cependant, une nouvelle dynamique semble se dessiner avec la montée en puissance de l’aviation marocaine, renforcée par l’acquisition des F-16V Block 70 , livrés en 2023, et des missiles AIM-120C/D . Pendant ce temps, l’Algérie peine à moderniser sa flotte de Su-30MKA, toujours limitée par l’absence de missiles longue portée de dernière génération , ce qui pourrait progressivement redéfinir l’équilibre aérien dans la région. Cette asymétrie soulève plusieurs préoccupations : Le Maroc pourrait exploiter cet avantage pour adopter une posture plus agressive , comme ce fut le cas par le passé. L'Algérie se retrouve exposée à une éventuelle suprématie aérienne marocaine , en particulier dans un scénario de conflit. Le...

Le Mythe du Soutien Marocain à la Révolution Algérienne : Une Histoire de Calculs et d’Opportunisme

L’histoire des relations entre le Maroc et la Révolution algérienne est souvent déformée par une propagande soigneusement entretenue par le régime marocain. Cette version des faits présente Mohamed V comme un allié indéfectible du peuple algérien dans sa lutte pour l’indépendance. Pourtant, une analyse minutieuse des événements démontre que ce soutien n’était ni désintéressé, ni motivé par une réelle solidarité. Il s’agissait avant tout d’un levier diplomatique visant à consolider le pouvoir du souverain marocain et à servir les ambitions territoriales du royaume chérifien. Un Soutien Dicté par des Intérêts Stratégiques Lorsque la Guerre d’Algérie éclate en 1954, le Maroc, fraîchement indépendant depuis 1956, se trouve dans une position délicate. Mohamed V cherche à asseoir son autorité dans un pays encore fragile, marqué par des tensions internes et des incertitudes quant à son avenir politique. Dans ce contexte, le soutien à la lutte algérienne contre la France devient un outil de né...